C'était un beau temps pour s'évader, ça ne pourrait me faire que du bien, si tenté que je mette ce temps à profit... Ce n'était pas vraiment pas vraiment mon fort, ces choses-là, mais il fallait bien essayer un jour plutôt que je reste encore enfermé dans mon sombre appartement ou que j'aille zoner à l'école, à force, ma réputation allait finir par être entachée : le professeur qui n'avait pas d'amis et n'avait pas d'autres endroits ou aller d'autre que son lieu de travail et sa maison... Tatsin !
Donc, pour éviter ce genre de phénomènes et les effets collatéraux, j'avais décidé, il y a déjà un moment en fait, d'aller explorer les environs. Et finalement, je me suis vite rendu compte que j'étais passé à côté de plein d'endroits assez sympathiques, ce qui m'avait un peu aidé à faire le point ces derniers temps. J'avais aussi pu vérifier que comme dans chaque ville, le quartier de la gare était le plus mal famé, autant dire que de nuit, c'était même pire.
Enfin, tout ça pour dire que j'en étais venu à l'excellente conclusion qu'il me fallait mieux me cantonner aux endroits plus cool et éviter ceux qui pourraient m'apporter des ennuis. Ainsi, je m'étais retrouvé sur cette plage. Moi qui était en quelque sorte un insulaire d'origine, je devais avouer qu'elle m'avait manquée lors de mes années en France, et que j'étais assez satisfait de la revoir ici. C'était drôle, enfin non, mais c'était comme un retour en arrière pour moi, case départ, sauf que je n'y gagnais pas grand chose... Au final, c'était à se demander pourquoi je restais là, je pourrais faire un vrai retour.
Non, trop compliqué, la vie de robot automate était bien plus simple.
Fort du succès de mon hémisphère gauche contre le droit, je fus prêt à décoller de chez moi. Je savais où j'allais, ce que j'y ferais et pourquoi. C'était une bonne chose pour mon petit cerveau qui avait besoin de toute cette organisation pour survivre à la routine. Je m'étirai doucement, après avoir avalé mon café avec dégoût, me demandant une énième fois pourquoi j'avais acheté une cafetière, avant de me souvenir une nouvelle fois que j'avais du mal à entièrement me réveiller sans, même après une bonne douche comme celle que je venais de prendre. Stupide, cette vie était stupide.
Je laissais la tasse rejoindre ses copines au fond de l'évier, attrapa une tablette de chocolat et mon sac puis me dirigeait vers la sortie. Bermuda, baskets, chemise légère à manches courtes, casquette, lunettes de soleil : j'étais méconnaissable, et c'était exactement ce que je voulais, il ne manquerait plus que quelqu'un de ma connaissance pénètre mon espace vital, et puis quoi encore.
Après plusieurs minutes de marche, je me retrouvais dans mon endroit préféré de la plage, une petite crique que j'avais trouvé lors de mes longues marches, qui se trouvait être aussi la place la plus tranquille. Il était rare que quelqu'un s'aventure par ici, sauf une femme nue évidemment. Nue. Mon regard s'arrêta sur la silhouette agréable qui s'offrait à moi en secret, avant que je reprenne mes esprits et que je m'assois pour ne pas être vu. Alors, soit je me trompais et cette plage était nudiste, auquel cas, en quelque sorte, tout allait bien, soit il y avait un truc, et là, j'étais victime d'un complot. Non, tout de même pas.
Enfin, je n'avais pas trop le choix que d'ignorer ce que j'avais vu, pas évident...
Une fois mes joues calmées, je respirais une ou deux fois avant de me résoudre à m'installer derrière une dune qui séparerait mon regard pernicieux de la vue de la jeune femme. Seulement, je ne tenais pas franchement à rester là très longtemps, la marée apportait sa quantité de vent qui lui-même m'envoyait du sable partout sur le corps pour un effet des plus déplaisants. Je restais donc peu de temps ainsi, car après tout, même si cette crique ne m'appartenait pas, j'avais aussi trouvé cet endroit et si certaines personnes voulaient s'y pavaner à poil, ce n'était pas de mon ressort. Pesant les pour et les contre, je me relevais pour me mettre en marche vers l'endroit où la jeune femme s'était maintenant allongée et, à mon déception comme à ma satisfaction, s'était rhabillée.
Je décidais donc de prendre mes distances, songeant qu'au final, le jeu n'en valait pas tant la chandelle, et saluais vaguement la jeune femme avant d'étaler ma serviette de plage, de m'asseoir dessus et de prendre cet excellent livre que j'avais arrêté la veille, avant de tomber dans un sommeil profond. Ouvrant la page cornée, marquant un nouveau chapitre dans l'histoire que je lisais en japonais. J'avais marqué fièrement mon territoire et je n'étais pas prêt de partir, na.
Sauf que j'avais encore commencé par le mauvais côté de la page... Mes réflexes d'occidental étaient vraiment embêtants, mais je ne comptais pas me laisser faire, je lirai ce livre jusqu'à ce que je fonde. Soleil, méfie-toi, j'ai une bouteille d'eau dans mon sac !